Amerrissage en Méditerranée – On aime le poisson

Après un repos bien mérité; je parle évidemment pour l’avion, nous c’est une autre histoire, l’heure est arrivée de faire faire un petit tour d’avion sur la côte à des amis.

VM? Vous êtes perdu?

Cap d'Antibes

Quai du large

Lundi 17 août, 10H30…

« […] Rappelons Alpha 2, Victor Mike »

Contact radio établi et clairance donnée; nous roulons au point d’arrêt Alpha 2 -point d’attente avant d’intégrer la piste et décoller Ndlr-.

Des procédures et messages radios plus tard, nous voici en route pour le point de report Sierra Alpha (SA) avec pour consigne d’y être à 1500ft (450m). Je passe avec Nice contrôle à qui je fais part de mes intentions: longer la côte jusqu’à Nice et retour.

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On surveille les bateaux en cas de panne moteur…

Il me donne un itinéraire à suivre et m’impose une altitude de transit: 500ft (150m). Ca ne me laissera guère de temps en cas de soucis moteur, mais qu’importe, il y a beaucoup de bateaux et nous n’avons eu qu’une seule panne moteur depuis le début :D. Je surveille les bateaux pour amerrir à côté d’eux en cas de nécessité.

J’arrive au point Echo Alpha (EA), le temps de faire demi tour est arrivé. J’annonce mon intention au contrôle. Il me donne la clairance pour le changement de cap et me dit de rappeler au point Sierra Bravo (SB). Je me dirige donc vers ce point de report. Mon esprit est tout de même perturbé de voir deux points portant le même nom. J’utilise à ce moment là, le GPS. Je me dis cependant que ce deuxième point est fait exprès pour éviter les croisements sur le même itinéraire.

Nice cote dazur

Nice côte d’Azur

J’ai totalement faux, je me fais rappeler à l’ordre par le contrôle:

« VM, où dirigez-vous? »

« Sierra Bravo »

« Vous n’avez pas le bon cap, prenez cap 270, vers le cap d’Antibes »

« Bien copier, je me dirige vers le deuxième SB, j’en avais un autre sur mon GPS, mes excuses »

IMG_3558Après vérification sur ma carte 1/250000 de la côte d’Azur, le point vers lequel je me dirigeais n’existe pas. Comme quoi, il ne faut pas toujours se fier au GPS, et toujours avoir les cartes à porté de main… Je ne me suis pas fait avoir deux fois ;).

Après un vol sans histoire, nous nous réintégrons sur le circuit de Cannes et atterrissons.

Antibe

Tracé GPS avec les différents points virtuels

Tracé GPS avec les différents points virtuels


La traversée

Au départ de Cannes :)

Au départ de Cannes 🙂

Après le repas chez des amis; dont le fils a récemment été breveté – encore félicitation à lui-, nous rentrons chez nous, où un autre repas nous attend. Il est 22h00, quand enfin nous pouvons commencer à réfléchir au déroulement de la journée du lendemain: la Corse.

Où dormir? C’est après le 5ième hôtel contacté, que nous avons pu enfin avoir deux chambres.

Nos amis, en Corse sont à 20 minutes de Figari. Des échanges de SMS et appels téléphoniques plus tard, nous convenons que j’irai leur faire des tours d’avion le matin du second jour. Nous n’avons pas réussi à les convaincre de venir à Propriano, là où se trouve notre hôtel. Figari, pourrait un peu être compromis. C’est l’aéroport de la Corse du sud et le trafic pourrait être intense… La taxe aussi.

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Corse , nous voici 🙂

Mercredi 19 août. Il est 9h00, je prends les éléments pour le vol. J’appelle un ami pilote pour avoir son aide. La navigation qu’on entreprend comporte un survol maritime; outre les gilets de sauvetage qui sont obligatoires, je dois déposer un plan de vol. Celui-ci indique la route que je vais suivre, comporte une description de l’avion et de ses équipements, le nombre de passagers à bord et les coordonnées du pilote. Sur le plan de vol figure également, l’heure du décollage et le temps de vol prévu. Lorsque nous arriverons à destination, nous devrons clôturer le plan de vol. Dans le cas contraire, les différentes étapes du processus de recherche et secours sont enclenchées. Les indications renseignées sur le plan de vol permettent de faciliter les recherches. Bref, mon ami m’aide à renseigner les différents éléments du plan de vol par téléphone. Ca faisait un moment que je n’avais pas déposé de plan de vol.

Nous décollons avec 10 minutes de retard sur le plan de vol.

« Rappelons Sierra Whisky, 1500 ft – Victor Mike »

Le contrôle nous donne une route à suivre pour sortir. Au point Sierra Whisky (SW), nous passons avec Nice.

« […] rester 2500 ft, rappelez Merlu »

Corse V1

Corse, nous voici ! 😀

Après quelques minutes de vol, mon frère commence à avoir faim. J’ai du fil de pêche dans l’avion. On ouvre le cockpit, et hop, c’est partie. Après tout, nous ne sommes plus très loin du point de report, il parait que c’est concentré de Merlu :D.

IMG_3568Tous les points de report pour aller en Corse portent un nom de poisson ou presque tous. La légende voudrait qu’ils aient été donnés par plusieurs pilotes sauvés par ces poissons lors d’un amerrissage. C’était leur seul nourriture. Un pilote a pêché du Merlu, un second… Qui sait, nous aurons peut être, la chance de donner le nom d’un poisson à un point de report :).

Trêve de plaisanterie :). Nous faisons la traversé à 2500ft. Chaque œil dans l’avion guête les bateaux… toujours en cas de panne moteur.

Après 1 heure de traversé, nous arrivons au niveau Calvi, je prends un nouveau cap, direction Propriano via le transit côtier. Le paysage est vraiment magnifique!

Propriano

Propriano

Propriano

Une petite heure plus tard, nous voici arrivé à Propriano, terrain dont je n’arrête pas d’en avoir les louanges. Chaque année, une sortie est organisée avec l’association des Jeunes ailes. Jusqu’à présent, je n’ai pu y aller, j’espère que la prochaine sera la bonne :).

Propiano, l'aérodrome :)

Propiano, l’aérodrome 🙂

Propiano, enfin! Il est pile l’heure du repas :D. Un restaurant est sur le terrain, nous nous apprêtions à nous y diriger, quand Serge nous indique que son amie vient nous chercher et nous amène dans un bon restaurant en ville ;).

Corse-allerOn visite les lieux, nous prenons possessions de nos chambres et… il est 15H00, on s’endort tous! Faut savoir, depuis que nous sommes sur la cotes d’Azur, entre repas de famille et amis, nous n’arrêtons pas.

Le soir, nous sommes invités. Elle vient nous chercher à Propriano pour nous amener chez elle. Un endroit, totalement atypique. Une maison au milieu de nulle part. Le plus proche voisin, un hangar est à environ 500m. Tout autour, c’est la colline et un paysage magnifique qui s’offrent à nos yeux.

montagepropriano

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Vue de chez notre hôte

En me posant à Propriano, j’ai appris -par le gardien des lieux-, qu’aller à Figari pour ravitailler c’est la galère. En plus, il faut demander une PPR -Prior permission required-, c’est à dire qu’il faut demander une autorisation d’atterrir, c’est 6h d’attente avant d’obtenir une réponse. J’abandonne l’idée de faire faire un tour aux amis à Figari et de ravitailler là bas par la même occasion. Je leur propose de venir à Propriano, je ravitaillerai à Ajaccio.

Ils abandonnent, c’est à 1H30 de voiture. Pas de local le lendemain: matinée libre.


Calvi

Un réveil en MUSIQUE

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Vue de la chambre 🙂

Nous nous sommes tous levés aux alentours de 7H00. J’ai pu profiter d’une jolie vue à mon réveil :). Petit déjeuné à 8h00, retour dans la chambre, et…

« VROUUUUUMMM »

Quel est ce doux bruit ??? Je cours à la fenêtre… Deux canadairs font leur passage. Je prends mon appareil photo, et j’attends leur second passage. Le premier était, je pense, un passage de reconnaissance.

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J’ai trouvé une vidéo amateur qui les filmait en train d’amerrir (ou de faire le plein de leur cuve). Dans tous les cas, ce qui était certain, c’est qu’au même moment, il y avait un feu au centre de la Corse. Je n’en sais pas plus.

Direction Calvi

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Décollage Propriano

Il faut que l’on ravitaille pour rentrer à Cannes. Par ailleurs, il n’y plus grand chose à faire à Propriano –et pas d’essence-. Nous avons la possibilité de ravitailler à Ajaccio ou à Calvi. J’ai vérifié, nous avons assez d’essence pour nous rendre à Calvi. J’ai un super souvenir de cette ville perchée sur son promontoire. C’est acté… Direction Calvi, et restaurant là bas.

Nous décollons de Propriano, et croisons tout un tas d’appareil aux alentours. Nous suivons le trait côtier, le direct pour Calvi n’est pas possible. Un appareil l’a demandé, mais celui-ci lui a été refusé, peut être à cause du feu qui règne dans les terres.

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Un problème de taille

Nous profitons de notre vol paisible en admirant le paysage. L’avion est stable à 2500ft (environ 800m). Mon pilote automatique -mon père ndlr- veille.

Nous arrivions à mi-chemin quand soudain, le moteur se mit à tousser, suivi de pertes de puissance. Quelques minutes d’agonie plus tard, ce dernier se tue définitivement. Notre moteur à rendu l’âme! Il laisse le seul sifflement du vent et les grésillements de la radio perturber le silence pesant du cockpit.

Calmement, je vais chercher ma vitesse de finesse max1. Je lance mon appareil à l’assaut des terres pour m’y rapprocher le plus possible. Je profite de la vitesse excédante pour gagner le maximum d’altitude. Mes passagers restent calmes et attentifs.

« Essence OUVERT SUR LE PLUS PLEIN »

« Mixture PLEIN RICHE »

« Magnéto 2+2 »

« Batterie ON »

« Alternateur et systèmes électriques sauf radio et transpondeur OFF »

« Gaz EN POSITION »

J’effectue ma recherche de panne, pour la deuxième fois depuis le début de cette aventure. Malgré tout, j’essaye de relancer le cœur de la bête à coup de défibrillateur -démarreur-. Dans le même instant, je préviens le contrôle de ma situation d’urgence et de détresse.

IMG_35631 minutes, c’est le temps qu’il m’a fallu pour faire toutes ces actions… Je vous garanti que ça parait très long, surtout quand l’horloge divine a toutes ses aiguilles qui convergent vers un même point: le zéro, l’heure de la fin! Finalement, on va peut être l’avoir notre point de report avec notre poisson sauveur :).

2000 ft (666m)…

C’est à ce moment là, je prends conscience qu’un amerrissage est inévitable.

« Ici votre commandant de bord qui vous parle, équipez vous de  vos gilets de sauvetages, ne les enclenchez qu’une fois l’avion évacué. Vérifiez vos ceinture de sécurité, mettez vous en position de sécurité… »

Je déverrouille et entrouvre le cockpit.

Calmement, je recherche une zone où amerrir; au plus près d’un bateau. Par chance, ce n’est pas ce qu’il manque dans le coin.

1600 ft (540m)…

Je m’imagine une piste infinie devant moi… J’essaie d’oublier ce bitume qui ondule de plus en plus au fur et à mesure qu’on se rapproche.

1000 ft (300m)…

Maintenant, je distingue plus nettement les vagues… J’oriente mon appareil parallèlement aux vagues, calmement et toujours dans un silence de plomb.

L’air froid de l’extérieur refroidi l’intérieur de cockpit… J’ai malgré tout chaud. Mes yeux ne quittent pas l’extérieur, ils sont fixés sur mon objectif: le point d’impact! Je surveille constamment ma vitesse.

500 ft (150m)…

Tous volets sortis, nous nous approchons inlassablement de ce mur d’eau… Elle nous paraît bien moins sympathique tout d’un coup… Je commence à cabrer l’appareil. La vitesse diminue.

100 ft (30m)…

Quelques secondes avant l’impact… Je poursuis dans ma lancé. Je continue à cabrer et ralentir l’appareil…

50 ft (15m)…

J’essaye de viser une crête… mais ce n’est plus le moment… Je cabre. Mon bute, toucher avec un taux de chute quasiment2 à 0. Je reste concentré. Je continue à cabrer pour toucher d’abord la queue de l’appareil.

Encore quelques mètres… Je peux ressentir le buffeting3, et entendre l’alarme de décrochage5 qui gueule à plein poumon.

La queue touche en premier. Tout semblait se passer comme prévu, jusqu’à ce qu’une vague déséquilibre l’appareil. L’appareil bascule sur la gauche….

… et, le choc!!!!

Je me réveille en sursaut! Mon père vient de se prendre une sévère turbulence et à donner un coup de manche. L’aile droite s’est levée subitement! Je reprends les commandes.

Nous sommes à 25 minutes de Calvi.


Une ville magnifique

« […] Rappelez final 18 »

Après avoir contacté la tour de contrôle de Calvi au point d’entrée de leur zone, il me donne la clairance pour atterrir sur la piste 18.

Final à Calvi

Final à Calvi

La particularité de l’aéroport de Calvi, c’est qu’on ne peut pas se déplacer à pied sur le terrain. C’est donc une personne en voiture qui vient nous chercher à l’avion et nous dépose à l’aérogare: notre chauffeur est avancé.

Avant d’en arriver là, il nous faut du pétrole, notre moulin à soif. A la radio, j’ai pris soin d’avertir que je désirais ravitailler. Une minute après que mon moteur ait été arrêté -cette fois ci, par mes soins et réellement :)-, le camion citerne se gare à mes roues. Le pompiste nous fait un petit cour sur l’essence, surtout sur la vapeur d’essence et le risque qu’elle représente. Une étincelle peut enflammer de la vapeur d’essence qui se trouve à 500 mètre de sa source. La flamme peut remonter la vapeur d’essence jusqu’à celle-ci et la faire exploser. Ce sont des expériences que font les pompistes dans leur formation. Intéressant!

Ravitaillement à Calvi

Ravitaillement à Calvi

J’adore Calvi, je trouve cette ville vraiment magnifique. Les vielles rues, étroites et pavées. La vue en hauteur et dominant la mer avec un aperçu des montagnes… Non vraiment magnifique!

Une marche en ville, sur la plage… Quelques photos plus tard, et nous voici de retour sur le terrain… Il est 16H25. Nous sommes obligés de passer par le SAS de sécurité, carte d’identité et licence de pilote à présenter: normal. Les passagers doivent également présenter leur carte d’identité… Et ils ne l’ont pas nécessairement. Heureusement, mon frère avait une photo de sa carte d’identité sur son téléphone. En plus de ça, nous sommes tous obligé de passer par le portique de sécurité et faire passer nos « bagages » aux rayons X. Comme si mes passagers -ma famille- représentaient un quelconque risque pour le pilote; moi même. Mhm, à Calvi, l’accès est vraiment drastique, peut être un peu trop exagéré!!! A Cannes, il n’y a pas tout ça, alors que le trafic est bien plus dense. Souvenez-vous, si vous allez un jour à Calvi, prévoyez la carte d’identité pour tout le monde!

montage_calviBref, nous voici sur le chemin du retour, on est encore attendu pour un repas ce soir, à 20H00. Le dernier avant notre retour à Angoulême le lendemain matin.

La suite, Angoulême, le retour à suivre 🙂


1. Finesse max Vitesse permettant de planer sur la plus grande distance tout en perdant le minimum d'altitude.
2. Taux de chute Vitesse verticale de l'appareil
3. Buffeting Vibration qui se ressente dans l'appareil avant que celui ci ne décroche. Le Buffeting est la conséquence du changement de l'écoulement d'air sur les ailes.
4. Décrochage Les ailes ne génèrent plus de force aérodynamique suffisant pour contrer le poids. Celui-ci décroche: tombe (explications plus précises via le lien).

Une réflexion au sujet de « Amerrissage en Méditerranée – On aime le poisson »

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